« Récession : quelle est la première erreur des entreprises ? » En 2009, le Financial Times avait placardé cette question sur des panneaux publicitaires abandonnés par les annonceurs. La réponse, bien sûr, se trouvait dans la question : en période de crise, faire des économies de marketing est une fausse bonne idée.
Asos, une entreprise d’e-commerce britannique, spécialisée dans l’habillement et les cosmétiques, a enregistré l’an dernier une perte d’environ 32 millions de livres (35 millions d’euros). De mauvais résultats que le nouveau CEO, Jose Antonio Ramos Calamonte, a notamment attribués à une mauvaise stratégie marketing, avec des investissements trop faibles et trop orientés vers la performance (le nombre de clics ou de ventes par campagne), au détriment de la notoriété. « Asos a historiquement sous-investi dans le marketing par rapport à ses pairs », a-t-il reconnu. Des propos qui résonnent avec l’avertissement du Financial Times, il y a 15 ans déjà.
Bien sûr, en période de crise – et les dernières prévisions de la Banque nationale ne sont pas encourageantes –, les entreprises peuvent être tentées, voire contraintes, de réduire les dépenses pour répondre à une baisse des ventes et des bénéfices. Et dans ce cas, le budget marketing est souvent l’une des premières victimes.
L’erreur, justement, est de considérer le marketing comme une dépense, au lieu de le considérer comme un investissement. L’expérience du passé le confirme. Ainsi, une étude américaine, menée par McGraw-Hill sur 600 entreprises dans les années 1980, a montré que celles qui avaient maintenu ou augmenté leurs dépenses de marketing pendant la récession avaient ensuite (nettement) augmenté leurs ventes, au moment de la reprise économique.
Pourquoi et comment ?
1. N’alimentez pas la spirale descendante
Si vos revenus sont en baisse, sabrer dans les dépenses publicitaires ne les fera pas remonter, au contraire – même si cela soulagera temporairement votre trésorerie. Les clients achètent certes moins en période de ralentissement économique, mais ils continuent tout de même à consommer et ils se tournent très naturellement vers les marques les plus visibles : celles auxquelles ils restent exposés. Ce seront les mêmes auxquelles ils feront confiance quand la reprise sera là. Réduire votre budget marketing risque de vous faire perdre des parts de marché.
Par ailleurs, tous les commerciaux savent qu’il est beaucoup plus coûteux d’acquérir des clients que de les conserver. Les clients qui vous oublieront pendant la crise seront difficiles à reconquérir ou à remplacer.
2. Saisissez votre chance
Les crises sont des périodes de difficultés mais aussi des périodes d’instabilité, où les situations les mieux établies peuvent vaciller. Des moments où les occasions se présentent, dont celle de bousculer vos concurrents. Certains d’entre eux vont probablement réduire leur présence publicitaire. Ils vous cèdent la place ? À vous de l’occuper.
Forbes rappelle ainsi que, pendant la crise du début des années 90, aux Etats-Unis, McDonald’s cessa de faire de la publicité, se reposant sur son statut de leader. Ce qui permit à Pizza Hut et Taco Bell, qui avaient maintenu leurs campagnes, d’augmenter respectivement leurs ventes de 61% et 40%.
Adaptez votre message à la situation : pendant la crise des années 1970, Toyota a taillé des croupières aux autres constructeurs automobiles en insistant sur le prix modéré et la faible consommation de ses modèles.
3. Profitez des conditions du marché
En période de crise, le coût-contact diminue. C’est la loi de l’offre et de la demande : s’il y a moins d’annonceurs, les diffuseurs (plateformes numériques, éditeurs de presse, régies publicitaires…) baissent leurs prix. Avec un même budget, il y a donc de fortes chances que vous puissiez augmenter votre présence, la fréquence de vos annonces, ou que vous puissiez obtenir de meilleurs emplacements ou de meilleurs créneaux horaires, selon les canaux envisagés. Bref, vous pourrez élargir votre public-cible ou le cibler plus efficacement.
4. Adaptez-vous
Maintenir le budget marketing ne suffit pas à garantir un résultat. Encore faut-il dépenser avec pertinence pour atteindre l’objectif visé. En cas de ralentissement économique, il est important de bien ajuster le message, mais aussi l’offre. S’il faut faire des choix, concentrez-vous sur les produits et les services les plus robustes et les plus adaptés au contexte de crise : entretenir un catalogue trop large va mobiliser des ressources qui seraient mieux affectées ailleurs. Plutôt que de réduire vos dépenses, optimisez-les, par exemple en décloisonnant des budgets entre différents départements.
C’est la même chose pour les canaux à choisir ou les actions à mener. Comme dans l’exemple d’Asos, n’oubliez pas qu’une campagne de performance à court terme, quantitative, ne vous dispense pas de travailler votre notoriété à long terme. Pensez qualitatif.
Enfin, les crises sont aussi des périodes d’innovation, comme on a d’ailleurs pu le constater pendant l’épidémie de covid. Soyez attentif aux changements d’habitudes de vos clients, mais aussi aux nouveautés que peuvent vous proposer les diffuseurs publicitaires – et pas seulement dans le domaine numérique.
La première erreur des entreprises, en période de crise, c’est de se rendre invisibles. Souvenez-vous de l’adage : « Loin des yeux, loin du cœur » …